❊ topic commun - la parade de thanksgiving

La blonde n'était pas spécialement à l'aise dans cette foule. Elle avait souhaité rester chez elle, bien sagement et surtout seule, mais n'avait finalement jamais pu lutter face à cette bande qu'elle fréquentait régulièrement : ceux qui l'accompagnait lors de ses show. La motiver n'avait en fin de compte pas été plus compliqué que ça, puisqu'elle avait cédé dès que la fine équipe avait parlé de donation. Les fonds récolté seraient dédié à une offre caritative visant à offrir un Noël aux plus démunis. En outre... Le refus de la jeune femme s'était transformé en un accord des plus enthousiaste en quelques secondes à peine. Ainsi sourire aux lèvres, endurant les coudes et les épaules de la masse la bousculant, elle pu atteindre le bâtiment aux portes grandes ouvertes. Pas de guichet fermé cette fois, et moins encore de vente de billet. Assister à ce qu'il se passerait ici serait des plus gratuit et les spectateurs seraient libre de délester un peu leur porte-monnaie ou non.

La pauvre contourna la salle pour passer en coulisse, où elle y retrouva ceux avec qui elle partagerait une partie de cette date. Pas besoin de répétition pour un show qu'elle connaissait par cœur, ainsi ils attaqueraient directement les choses sérieuses. Sarah prit le temps d'étreindre chacun de ses acolytes avec sourire et bonne humeur, sa jovialité habituelle se répendant tel une traînée de poudre. De longues minutes de convivialité enfantine, à coup de blague et de fausses réprimandes ou chacun y allait de son avis. Et puis... Ça y était. Le stress gagna chacun des artistes présent, pas toujours pour les mêmes raison. Parce que ce spectacle-ci se ferait en majeure partie les yeux bandé, l'événement pouvait tourner au cauchemars en un clin d’œil -espérons que ce soir, ce ne soit pas le cas. La jeune femme souffla pour évacuer une partie de son anxiété et de ses doutes, avant de miser sur la confiance qu'elle avait en chaque personne ici présente. Le système de pluie (Rain Room) était heureusement silencieux, et la salle fut plongé dans le noir sans crier gare.

La jeune femme ne mit pas longtemps à se placer à cet endroit qui s’avérerait crucial pour la totalité du spectacle. Un choix stratégique ou chaque mouvement serait désormais calculé au millimètre près. Et puis... La musique se lança. Tel le vent, les premières notes emportèrent avec elles l'intégralité des inquiétudes de la jeune femme, dont l'expression changea brutalement. Professionnel ? Pas seulement. Parce que ce script était conçu de sa main. Parce qu'il lui correspondait et racontait une histoire : la sienne. Celle dont elle ne parlait jamais, et qu'elle masquait derrière sa bonne humeur. Pour la suite... Les spectateurs seraient libre d’interprétation, et elle se fichait en réalité de savoir si ça leur parlerait ou non. La seule chose certaine, était que c'était magnifique... Et en totale contraste avec les habituels spectacle de rue lors de fêtes comme aujourd'hui.

Les applaudissements succédèrent à la fin du spectacle sans aucun problème. La blonde s'inclina prestement, souriante et enjoué devant une telle réceptivité face à cet art si peu courant qu'elle pratiquait. Elle remercia la foule sans vraiment savoir si elle se faisait entendre puis quitta la scène avec ses comparses, descendant directement parmi la population pour y échanger quelques mots, quelques sourires. Une chose franchement peu commune chez les artistes, qui s'empressaient généralement de disparaître pour retrouver le calme. Mais pas eux. Ce groupe là aimait le contact, et ça se voyait dans chacun de leur regard ; la blonde n'y faisait pas exception alors qu'elle discutait avec quelques personnes sur la technicité de sa prestation. Pas des connaisseurs visiblement, si bien qu'elle évita tout propos un peu trop technique et resta presque vague dans ses explications qu'elle fournissait sans effort. Son partenaire de dance lui apporta rapidement une petite bouteille d'eau dans laquelle elle s'empressa de boire un bon tiers sans s'arrêter. Son regard s'arrêta alors sur une silhouette... Douloureusement familière. Un spectre. C'était exactement ce qu'elle cru voir alors qu'elle se sentie au bord du malaise l'espace d'une seconde.

Ignorant les propos de son ami sur sa gauche qui sembla remarquer la chose, elle s'éloigna de ce dernier et tenta de se frayer un chemin vers cette ombre qui hantait ses souvenirs. Elle fut pourtant forcé d'arrêter son avancé lorsqu'un nouveau groupe, un peu trop collant cette fois, vint l'aborder pour offrir leurs félicitation. Nouveau remerciements, nouveau sourire... Mais le cœur n'y était pas cette fois et son regard non plus. Elle dû pourtant abdiquer en comprenant que celui qu'elle avait cherché à atteindre s'était volatilisé, et se demanda même à quel point elle n'avait tout simplement pas été victime de son imagination. Inconsciemment, ses doigts s'étaient agrippé sur ce bandeau trempé qu'elle tenait dans sa main gauche alors qu'elle reculait de quelques pas pour tenter de respirer convenablement, se concentrant au passage pour retrouver un rythme cardiaque tout à fait normal. Elle observa alors l'un de ses collègues passer entre tous, chapeau en main. Elle esquissa un sourire à son attention, et le jeune homme le lui rendit dans une légère moue. Le message fut aussitôt compris par la Blonde qui soupira fortement, presque en proie à la déception alors qu'elle retournait voir celui ayant participé à l'ouverture du spectacle. Elle plaisanta ainsi avec ce dernier, lui glissant qu'un jour ils devraient échanger les rôles, mais n'eut pas le temps d'enchainer. Quelqu'un vint les interrompre depuis sa gauche... Pour la féliciter, à priori. Elle fronça un instant les sourcils devant cette soudaine irruption, observant le nouveau venue. Bien fringué, bien apprêté... Du groupe, c'était à se demander lequel des trois humains n'avait pas sa place ici. Elle, trempé jusqu'aux os. Son ami, également trempé et torse-nu. Ou bien l'étranger, bien fringué et bien apprêté ?... Un riche. C'était certain. Ou au minimum un qui menait une vie plus qu'aisé. Si la blonde n'appréciait pas spécialement cette population, elle ne chercha pourtant pas à juger celui se présentant sous le nom de Julius Gardner et lui rendit son sourire.

- Sarah, enchanté. Merci pour les compliments, mais je suis encore loin de la perfection et...

Elle n'eut pas le temps de finir. Il s'éloignait d'elle dans cette objectif de lui fournir à boire, ce qui eut le don de faire glousser la vivante délaissé sur place. Visiblement, il n'avait pas vu qu'elle disposait déjà de sa propre bouteille. une petite, c'est vrai. Mais elle avait de quoi s'hydrater malgré tout et un stock se trouvait derrière la scène à disposition des artistes. Elle le perdit de vue alors qui passait non loin du récolteur de fond et haussa les épaules, se tournant vers son ami artiste qui était demeuré là tout du long. Elle se remit à plaisanter avec et se chamailla presque, tel deux gamins qui s'appréciaient et ne pouvaient s'empêcher de se titiller ; sans méchanceté aucune, juste de la pure convivialité. Pour échapper à une tape, le jeune homme grimpa d'ailleurs sur la scène et prit ses jambes à son cou avant de se retourner vers la blonde le temps de la provoquer. Pas besoin de plus !... Ou si, en fait. Elle s'apprêtait à suivre le mouvement et à enchainer dans leurs idioties, mais Monsieur Gardner revint à ses côté juste à l'instant où elle posait ses mains sur la scène pour y grimper à son tour. Un instant, elle se sentie vraiment idiote. Pour autant, ça ne lui fit pas perdre sa bonne humeur alors qu'elle s'asseyait finalement pour observer l'homme sans nul doute bien plus âgé qu'elle.

- Merci, c'est gentil mais..., commença-t-elle avant de montrer sa bouteille. ...J'ai tout à fait ce qu'il faut, vous n'aurez qu'à offrir ça à quelqu'un d'autre en ayant besoin... Ou à le garder pour vous. Par contre vous devriez vraiment goûter ces biscuits, ils sont artisanales et vraiment excellent !

Toujours enjoué et souriante, elle balançait ses pieds qui ne touchaient plus le sol à intervalle régulier telle une gamine impatiente. Elle détailla plus attentivement celui avec qui elle se retrouvait à converser avant de planter son regard dans le sien comme si elle y cherchait un quelconque mensonge possible.

- Et si vous me parliez de ce projet ? En quoi puis-je vous aider, au juste ? demanda-t-elle avant de finalement saisir la bouteille qu'il avait tenté de lui offrir plus tôt, comme si elle revoyait son avis. Attrape, Jay ! Si tu pouvais éviter de t'effondrer, ce serait sympa !
- Tu sais que je rêve de ce jour où tu me soigneras ! blagua le destinataire qui failli perdre le chapeau qu'il tenait en attrapant le bien, faisant éclater de rire la blonde qui lui adressa un clin d'œil avant de reporter son attention sur Julius.
- Merci pour la bouteille, déclara-t-elle alors comme si rien n'était. Donc... Ce projet consiste en quoi ?

La blonde fronça légèrement les sourcils lorsqu'il fit allusion à son ami artiste. Parce qu'il avait songé l'inviter elle-seule, à la base ?... Si c'était le cas, il n'aurait aucune chance. Car ils étaient une bande d'inséparable pour ce genre de prestation, car ils avaient chacun des connaissances complémentaires, car ils étaient une équipe quand bien même ce soir seule la jeune femme avait agit à la lumière des regards. Dans le spectacle, ceux sur scène ne pouvaient jamais rien faire sans ceux qui, depuis les ombres, géraient l'intégralité des choses : technique, sécurité, fonctionnement,... Sans eux, Sarah n'aurait rien pu faire et elle était bien placé pour le savoir. Si elle avait dû dire oui avec empressement, elle ne l'aurait jamais fait sans "les siens". Elle retint cependant la période et le projet défendu, y réfléchissant brièvement sans avoir le temps d'ouvrir la bouche : elle fut coupé dans son élan avant même qu'une lettre ne quitte ses lèvres. Le fautif ? Un certain Joshua, haut comme trois pommes mais le regard expressif. La blonde fut aussitôt attendrie par le gamin. Elle ignorait son âge, mais si elle était devenue mère... Nul doute que le sien serait dans la même tranche. Repoussant au loin cette tristesse qui menaçait de l'envahir, elle eut un regard affectueux alors qu'elle se penchait légèrement vers lui. Une idée, un éclair, une suggestion. Une chose, en cet instant, lui passa par la tête. Une seule et unique : prolonger son émerveillement. A tel point qu'en fait, de la suite elle ne retint que le prénom de l'enfant. Du moins en quelque sorte ; elle entendit bien le dialogue de l'homme mais ne s'en préoccupa pas vraiment en comprenant que quelque chose la dérangeait dans l'attitude du parent. Une étrange impression de se faire acheter, peut-être ?... Ou manipuler. A voir. Elle en avait aucune foutue idée mais savait que, peu importe la personne, l'argent pouvait rendre ainsi : persévérant par égoïsme. Le genre de chose qu'elle n'appréciait pas en fait, mais au vu de ce parlé qu'il avait... Il devait avoir passé au moins la moitié de sa vie avec un compte en banque capable de faire des miracles auprès de bien des vies sans l'appauvrir pour autant. Ah, les riches et le business... C'était vraiment un univers à part. Mais ceux-là savaient voir les points faibles et en tirer partie dans ce seul principe de servir leurs intérêts, allant souvent jusque vous -ou autre chose- caresser dans le sens du poil et vous amadouer... Quand bien même il s'agirait d'œuvre caritative, qu'importe. La pauvreté n'avait toujours été qu'un prétexte à la bonne image et à la bonne conscience pour ceux-là et la blonde, au final, était sans doute des mieux placé pour le savoir. Une preuve ? Voyez par vous-même : ce dénommé Julius Gardner n'avait pas versé un centime ce soir et se permettait désormais de les quémander pour la charité. Un peu ironique, n'est-ce pas ?... Du point de vue de l'artiste, oui -ce chapeau passant à plusieurs reprises non loin de l'homme en cravate était resté ignoré par ce dernier, ça ne lui avait pas échappé. Ça l'était... Au point d'en être presque ridicule, ce qui était une raison supplémentaire de se concentrer sur cet innocent enfant.

- C'est bien ça, je suis la dame qui vole, confirma-t-elle dans un sourire franc. Et toi, ça te dirait d'être l'enfant qui vole ? Tu veux qu'on essaie ?

Le regard du bambin sembla s'illuminer de milles feux alors qu'il jetait un coup d'œil franchement bref à son père avant d'acquiescer avec vivacité. La jeune femme fut étonné de le voir tendre ses mains vers elle mais, devant tant de spontanéité, elle en fit autant. Elle s'empara de lui sans le moindre problème et ne se posa même pas la question de savoir si le parent était d'accord ou non avec ce fait. Parce qu'aussi fugace soit le rêve d'un enfant, elle se faisait un plaisir et un honneur de le réaliser. Il n'avait qu'à demander ; elle s'exauçait, et mettait tout en œuvre pour ce faire. En grandissant, l'imagination se perdait souvent au profit de la société. C'était donc à son sens une raison de plus de lui donner des souvenirs qu'il évoquerait avec le sourire et la bonne humeur lorsqu'il deviendrait adulte, plutôt que de songer aux freins paternel ou maternel qu'il pourrait endurer des années durant, l'empêchant de vivre et savourer pleinement chaque instant. Donner était peut-être un art de vivre, dans le fond ; celui de la blonde, qui se dirigeait déjà vers les deux traînes de tissu semblant tomber du ciel. Elle déposa alors l'enfant et vint s'accroupir devant lui en même temps qu'elle saisissait l'un des interminable ruban, lui indiquant quelques précautions à suivre... Si l'on peu dire. Un enfant restait un enfant, et elle voyait déjà une possible agitation se pointer alors qu'il trépignait sur place.

- Très bien, puisque tu as compris, laisses-toi faire d'accord ?, commença-t-elle. Ce ne sera pas long. Et si ça te fait mal, n'hésite surtout pas à le dire.

Spoiler:

Comme elle l'avait supposé, l'homme avait sûrement frôlé la crise cardiaque étant donné l'expression qu'il affichait désormais. Normal en soit : il fallait être dingue pour bien vivre ce qu'il venait de se passer. Ou être un parent totalement inconscient, au choix. Après tout, les deux ne se connaissaient pas et c'était finalement une confiance aveugle qu'il avait dû offrir à la blonde pour que le bambin puisse vivre ce moment unique en son genre. Pour autant, Julius ne sembla pas tant lui en tenir rigueur puisqu'il retrouvait sa chaire et son sang en un seul morceau et, en plus, des étoiles pleins les yeux. La jeune femme ne pu s'empêcher un léger rire lorsque le gamin demanda à son père d'avoir ce type de matériel au centre de sa chambre. Ca... C'était peut-être le meilleur des compliments, d'une certaine façon. La preuve qu'elle n'avait pas agit pour rien et que, indirectement, son art était reconnu par celui venant de le vivre quelques minutes durant. Nul doute bien sûr que la famille veillerait à ce que l'enfant ne prenne pas d'initiative avec ses draps ; Sarah en aurait fait de même... Si seulement elle avait pu demeurer mère. La jeune femme hocha légèrement la tête et esquissa un sourire lorsqu'il la remercia sincèrement, se permettant de poser une main sur la tête du gamin pour lui ébouriffer les cheveux alors qu'elle s'adressait tranquillement à ce dernier.

- Si tu veux, je t'apprendrais quand tu seras un peu plus grand..., annonça-t-elle sincèrement avant d'ajouter. A condition que tu sois sage, d'accord ?

Bien sûr, elle savait à quel point il était compliqué pour un enfant de rester sage. A cet âge, les bêtises étaient peut-être ce qui les forgeaient le mieux et c'est pourquoi sa précision ne faisait en réalité référence qu'à ce qu'il avait demandé à son père plus tôt. Un message sans nul doute compris, puisque le petit être sembla se renfrogner... Une expression enfantine qui arracha un léger rire à la professionnelle avant qu'elle ne reporte son attention sur le riche adulte. Lorsque Julius fit allusion à une erreur de sa part quant à sa précédente proposition, Sarah demeura calme et souriante en attendant la suite. Pour autant, ce sourire étirant ses lèvres s'effaça peu à peu -bien malgré elle- lorsqu'elle écouta cette seconde offre qu'on lui faisait. Si l'idée en soit pouvait être plaisante... Ca ne l'était pourtant pas tant que ça en ce qui la concernait. Ce qu'elle venait d'offrir au fils avait été totalement spontané et sans préméditation, ce qui rendait la chose bien différente de ce qu'on lui demandait désormais. Parce qu'elle n'avait jamais digéré la perte de son enfant, côtoyer ceux des autres de manières organisé et régulière lui était impossible ; insupportable.

- Je suis désolé, mais c'est impossible , commença-t-elle simplement avant d'ajouter sans réelles explications. Nous n'avons pas pour vocation de travailler pour ou avec des enfants.

Et elle ne mentait pas. Qu'il s'agisse d'elle ou de ceux avec qui elle travaillait régulièrement, il n'existait qu'une manière de faire : donner des spectacles spontanés, d'ailleurs souvent en extérieur. Parce que la vie manquait à leur sens cruellement de saveur lorsqu'elle était trop calibré et des plus routinière, chacun d'entre eux avaient pris pour habitude de faire le show un peu partout au simple gré de leurs envies. La plupart de leurs chorégraphies étaient en toute franchise improvisés ; seule trois d'entre elle avaient été réellement travaillés et tous les connaissaient par cœur depuis longtemps maintenant.

- Nous sommes bénévoles et n'avons pas pour habitudes de cibler un public en particulier. Pour autant, ce que l'on gagne est systématiquement transmis à ceux dans le besoin, déclara la blonde en toute simplicité, sans le moindre reproche ni la moindre accusation. Votre première proposition est la plus cohérente, même si dire que ça me met à l'aise serait vous mentir. Mais c'est pour la bonne cause et exceptionnel, non ?